Archives mensuelles : juillet 2023

Lectures de vacances avec les Éditions du 81

Besoin de fraîcheur ? D’évasion ? Avec un bon livre, c’est un peu de vacances en plus ! Alors passons un petit coup de projecteur sur les parutions récentes des Éditions du 81, des romans qui nous emmènent dans des univers étranges et envoûtants.

Il y a mon Augusta Helena, bien sûr, dont le second et dernier tome, L’Odyssée de l’Impératrice, conclut les aventures de cette héroïne hors normes, mère d’un empereur devenue sainte catholique et orthodoxe… mais pas du tout à l’eau de rose ! C’est un polar dans la veine du Nom de la Rose, où les mystères intellectuels se mêlent aux péripéties picaresques.

Autres univers, autres évasions : un texte aux confins du conte philosophique et de la poésie, L’élévation de Marie-Ange, de Philippe Rousselot, et un roman d’anticipation, Astérès, d’Igor David, qui inaugure une collection de science-fiction.

Tout récemment, enfin, voici La lettre de change, un polar noir et palpitant signé Davier.

Des livres à demander à votre libraire, ou à commander en ligne chez Amazon, à la Fnac, sur Cultura, Gibert, La Procure, LesLibraires.fr ou LibrairiesIndépendantes.com.

(Aussi publié sur mon Substack.)

Détails historiques et vraisemblance romanesque : un moustique, un fer à cheval et quelques terribles tragédies privées (rediffusion)

(Paru précédemment en mai 2020. À l’époque, nous étions encore en pleine pandémie… Je pense que ça n’a pas qu’un peu joué !)

Placer un récit à une autre époque, ce n’est pas seulement une question de détails matériels à vérifier, et pourtant ! Combien de romans par ailleurs palpitants laissent une impression désagréable au final parce qu’ils se sont plantés sur un point fondamental pour l’intrigue, ou même sur un détail périphérique mais qui change tout le climat de l’œuvre ?

Je pense par exemple à un roman policier de John Maddox Roberts (de la série SPQR) où la résolution de l’intrigue exigeait que l’on fasse la différence entre les chevaux des Romains, qui étaient ferrés, et ceux des Maurétaniens, qui ne l’étaient pas. Problème : à l’époque en question (fin de la République), les Romains non plus n’utilisaient pas de fers à chevaux. (Ils utilisaient des hipposandales, ou fers amovibles, à titre thérapeutique, pour protéger un pied abîmé, mais pas le fer à cheval proprement dit, qui date au plus tôt de l’époque byzantine.)

Ou bien que l’on songe aux libertés que prend Alexandre Dumas avec la chronologie du règne de Louis XIII dans ses Trois Mousquetaires : le véritable d’Artagnan devait avoir 12 ou 13 ans en 1625, au début du roman. Certes, on peut arguer que le héros ne fait qu’emprunter son nom au Gascon historique, que c’est un double romanesque… Reste que c’est une gaffe dans la construction du roman.

Mais tout cela, au fond, n’est que la partie émergée de l’iceberg, les aspects les plus faciles à vérifier et à appliquer quand on cherche à immerger un récit dans une époque historique, le nom des rois, reines, papes et autres dirigeants, le niveau technologique, les habits, les armes, même la botanique (pas de tomate en Europe avant Christophe Colomb…), tout cela demande simplement de la minutie et un accès à une bonne bibliothèque, ne serait-ce qu’en ligne. Là où cela devient une autre paire de manches, c’est si on veut essayer de reconstituer aussi l’univers mental d’une autre époque, sa représentation du monde et d’elle-même.

Pour en revenir aux Romains, par exemple, les hipposandales sont un indice intéressant à la fois du niveau atteint dans l’Antiquité par l’art vétérinaire, mais aussi de l’importance économique et militaire des chevaux et mules. La présence de mulomedici (médecins pour mules, littéralement) aux armées et dans les relais de poste nous en dit long également sur la capacité de l’Empire Romain à organiser et planifier.

Cet exemple nous montre un aspect du monde romain qui n’est pas si éloigné du nôtre : bureaucratie, techniciens spécialistes… Mais si on s’intéresse à la médecine proprement dite, on risque d’avoir des surprises.

Qu’est-ce qu’une maladie, par exemple ? Nous avons l’habitude de dire que telle infection est causée par tel agent pathogène, bactérie, virus, parasite, etc. Ou bien on relie un dérèglement physiologique à une anomalie génétique (certaines formes de diabète, par exemple) ou à un problème lié à la vie quotidienne (ainsi du surpoids et de l’obésité) du patient. On pense en terme de causes matérielles, avec des outils mentaux rarement antérieurs au XIXe siècle : même la définitions des tissus comme unités anatomiques date des années 1800, avec Xavier Bichat. La vaccination se développe à la toute fin du XVIIIe siècle avec Jenner. La médecine expérimentale de Claude Bernard date du milieu du XIXe siècle, et la théorie des germes a peu à peu accumulé des arguments empiriques (notamment les observations au compte-fils puis au microscope, à partir de 1700) jusqu’aux travaux définitifs de Pasteur. Quant à la génétique, malgré les bases posées par Mendel dans les années 1860, elle est née et s’est développée au XXe siècle.

Si on essaie de se placer en esprit à une époque antérieure au XXe siècle, c’est toute la relation de l’être humain aux maladies qu’il faut repenser. Imaginons à nouveau un récit placé à l’époque romaine : si un personnage tombe malade, comment raconter cela ? Si je parle de germes et de pathogènes, ou même si je mentionne la circulation sanguine, je sors de l’univers mental de l’époque, et donc je trahis l’esprit de mon récit. Mais si je reprends le vocabulaire des médecins de l’époque, avec ses miasmes et ses humeurs, cela donne vite un discours ridicule, du genre croqué par Molière dans son Malade imaginaire.

Il n’y a pas de solution parfaite ni universelle. En écrivant Augusta Helena, mon roman historique sur Hélène, mère de l’empereur Constantin, j’ai opté pour n’utiliser qu’au minimum le jargon médical antique, même en faisant parler un médecin. Mais je n’ai pas pour autant employé de concepts médicaux trop récents. Ainsi pour la question du paludisme, qui était une maladie endémique de la région de Rome, à cause des Marais Pontins et de leurs moustiques : on faisait dès l’Antiquité le lien entre les marécages et des maladies fébriles pouvant entraîner la mort, mais on pensait que c’était quelque chose dans l’air (d’où le nom italien de la maladie, malaria). Le rôle des moustiques comme vecteur est resté mystérieux jusqu’aux travaux de Carlos Finlay à Cuba en 1881. Dans mon roman, je n’ai mentionné les moustiques des marais du Latium que comme bestioles agaçantes, sans parler du lien avec la fièvre récurrente qui mine l’un de mes personnages et finit par l’emporter. Mais j’ai pris soin de citer les moustiques. (Par parenthèse, les Marais Pontins furent une plaie de Rome jusqu’aux années 1930, quand les grands travaux de Mussolini les ont asséchés et permis d’y faire de l’agriculture.)

La terminologie est donc déjà un point délicat, s’agissant des maladies, de leurs causes et de leurs remèdes. Mais plus encore, en écrivant un récit historique qui se veut réaliste, on ne peut pas ne pas prendre en comptes les réalités humaines d’une époque où la mort fauchait bien plus souvent, et aussi bien plus tôt. Avant l’introduction des vaccins, en Europe, un enfant sur deux n’atteignait pas l’âge adulte. Est-ce que mes personnages seront plus fatalistes face à ce genre de choses ? Probablement. Mais c’est difficile à faire passer pour des lecteurs modernes.

Il y a ainsi un passage dans Tous les Accidents, mon roman situé à l’époque de la Révolution et de l’Empire, qui a un peu perturbé les béta-lecteurs, et non sans raison : la mort d’un nouveau-né. Ce qui est pour nous l’horreur absolue, le drame des drames, était alors quasiment un passage obligé pour les familles. Ce qui m’intéressait, c’était justement comment réagissaient les survivants. J’ai une grand-mère qui a perdu son premier fils en bas âge à cause d’un accident et en a terriblement souffert, mais son éducation et son milieu social n’étaient pas favorables à l’extériorisation des sentiments. Ce qu’elle en disait, quand elle disait quelque chose, c’était : « Il faut porter sa croix. »

Une philosophie terrible, si on y songe.

Défi : écrire un roman sur l’Angleterre de Nelson sans parler de la Navy

Du sang sur les dunes, premier roman d’une série, et qui forcément la conditionne.

Je suis en train de terminer (croisons les doigts !) un roman policier qui se passe en 1802 en Angleterre. C’est pendant la brève Paix d’Amiens, donc la guerre est exceptionnellement en pause entre la France et le Royaume-Uni, mais l’ombre du conflit pèse sur l’intrigue. Mon protagoniste, Antoine Dargent, est parfaitement conscient que tout peut repartir au moindre prétexte, et il observe d’un œil critique les forces et les faiblesses de l’ennemi héréditaire. Mais il y a un hic : je ne peux pas lui faire acquérir trop de connaissances à propos de la marine, car dans le roman Du sang sur les dunes, qui se passe peu de temps après dans la série, il n’en a pas beaucoup, ce qui lui permet de découvrir avec le lecteur les problèmes du Camp de Boulogne (et pourquoi l’invasion de l’Angleterre projetée par l’Empereur n’a finalement pas eu lieu).

C’est un peu embêtant, mais c’est ainsi. Il faut un minimum de cohérence dans l’univers d’un roman ou d’une série. Ici, je suis obligée de ne pas approfondir les questions relatives au développement respectif de la marine anglaise et de la française, ce qui veut dire l’un des points les plus cruciaux des guerres napoléoniennes… et les plus douloureux pour notre pays. C’est la Navy qui a permis à l’Angleterre de tenir la France à distance du territoire national anglais tout en harcelant l’Empire sur toutes ses côtes, rendant ainsi possible la victoire finale. Et l’effort consenti par les sujets britanniques pour renforcer la Navy a été considérable, aussi bien en hommes qu’en argent.

Alors, devoir se priver d’explorer ces questions dans un roman est un peu difficile… Mais comme toute contrainte, cela peut aussi être une opportunité !

Nous qui connaissons la suite de l’histoire, nous avons oublié que l’Angleterre au tout début du XIXe siècle n’était pas dans une situation facile. Ils avaient certes remporté des victoires navales sur la France, en Méditerranée notamment, mais pas mis un coup d’arrêt à l’aventure de Bonaparte. La France émergeait de la décennie de chaos révolutionnaire dans une position renforcée, élargie de la Belgique, de la Savoie et autres territoires européens, et elle devenait la principale puissance sur le continent. L’Espagne, l’Italie, les Pays-Bas et une grande partie de l’Allemagne étaient des protectorats dociles. L’idée d’un bloc européen dominé par la France était un cauchemar pour les Anglais, pour des raisons tant géopolitiques qu’économiques. (C’est toujours plus ou moins vrai aujourd’hui, regardez les motivations du Brexit…)

Donc, dans le présent roman, plutôt que d’anticiper sur les événements et préfigurer Trafalgar, je me suis concentrée sur le moment vécu par mes personnages, sur ce qu’ils pouvaient savoir et éprouver. Et j’ai pris soin de ne pas faire passer l’intrigue trop près des arsenaux, des ports et des vaisseaux de Sa Majesté. Ce qui n’est pas trop difficile : la documentation est assez riche pour fournir en détails des dizaines d’histoires différentes. Ainsi, j’évoque d’autres aspects de la vie en Angleterre en 1802 : les campagnes et l’amélioration de l’agriculture, l’industrie en plein essor, la justice (roman policier oblige), les classes sociales, les débats politiques (pas très démocratiques, au point qu’on a pu parler de la « Terreur de Pitt », du nom du Premier Ministre d’alors), la question catholique, elle-même liée à la question irlandaise…

Et je n’ai pas totalement fait l’impasse sur les choses de la mer. On croisera un marin assez exceptionnel, le capitaine Thomas Cochrane, que la paix avait mis au chômage technique mais qui avait encore maille à partir avec l’Amirauté… Pas un caractère facile, mais un personnage passionnant. Il a d’ailleurs inspiré au moins deux séries historiques anglaises : Hornblower de C. S. Forrester, et les Aubreyades de Patrick O’Brian. Je n’en dis pas plus, je m’en voudrais de divulgâcher cet épisode.

Rendez-vous littéraire à la rentrée

Retenez cette date : vendredi 8 septembre 2023. C’est le jour prévu pour la parution de mon prochain roman, Mort d’une Merveilleuse, le deuxième de la série policière commencée avec Du sang sur les dunes.

Oui, je sais, j’avais déjà fait des annonces de ce genre l’an dernier… Mais cette fois, c’est la bonne : les volumes existent, je les ai vus, je les ai touchés ! L’imprimeur les a livrés et les libraires devraient être servis d’ici la rentrée.

Comme le titre le suggère, l’histoire se passe sous le Directoire, une époque relativement peu connue, en tout cas peu exploitée par la fiction. Dommage, il y a de la matière ! Intrigues politiques, changements sociaux, personnages hors normes… On croise Talleyrand, Barras, Bonaparte, mais aussi les « influenceuses » de l’époque, Juliette Récamier et Thérésa Cabarrus, et des aventuriers et aventurières sans trop de scrupules, que je me suis fait un plaisir d’intégrer dans mon récit.

Le livre est déjà disponible à la précommande sur le site de Cultura, et celui de la Fnac. Affaire à suivre.

On fait de belles choses en France

Je veux parler de l’exposition Fabriqué en France, qui était invitée au Palais de l’Élysée ce week-end, ouvert au public à l’occasion. Pas besoin d’invitation VIP, la preuve, j’y étais.

On ne va pas se mentir, le cadre est de grande classe, même si le bâtiment et ses jardins, vus de près, sont plus petits que ce ce qu’on peut imaginer. C’est un îlot de verdure au milieu de la ville, pas le parc de Versailles. Et les décors et meubles du XVIIIe siècle sont splendides mais donnent l’impression d’être dans un musée.

N’importe, on était là pour les entreprises et produits français à l’honneur. Et tout d’abord, comment s’y repérer dans les étiquettes et logos : « Origine France », AOC, et ainsi de suite.

Sur les 124 produits présentés, il y en avait vraiment pour tous les goûts : haute technologie et produits du terroir, artisanat d’art et objets du quotidien. Il y avait une maquette du robot sous-marin Ulyx et des bottes de guardian, des charentaises et des prothèses médicales, des robots et des pâtes alimentaires. J’y ai retrouvé ma marque préférée de sérum physiologique (Gifrer, présent dans toutes les pharmacies), mais j’ai aussi découvert qu’on faisait des montres en Polynésie et des pâtes en Guyane. Car si tout l’Hexagone était représenté, on n’avait pas oublié les Outremers. Quant aux entreprises, il y avait une majorité de PME, des startups, des artisans, et juste deux grandes entreprises. Les technologies et usages à impact environnemental étaient tout particulièrement à l’honneur : solution de désalinisation et dépollution de l’eau, vélos cargos, recyclage, matériaux de construction bas carbone, kits d’adaptation électriques pour voitures anciennes…

Robot sous-marin développé avec l’IFREMER
Rétrofit : un moteur électrique dans une 2CV.
Et la batterie pour le faire fonctionner.
Simple et élégant : une pompe solaire pour amener l’eau sale dans la sphère, où le soleil la chauffe, puis on la récupère en bas grâce à la condensation.
Une cloison végétale avec des Tillandsia cultivées à Cailar, dans le Gard
On fait aussi de chouettes instruments de musique en France
Du design, bien sûr, meubles de cuisine stylés
Les pâtes venues de Guyane
De la farine venue de Provence
Élégante et traditionnelle, la botte guardiane de Camargue
Montres de luxe avec de la nacre et des perles de culture de Polynésie
Gants en nitrile pour les soignants. On ne sera pas repris comme en 2020.
Bières artisanales de Corse
Encore de quoi manger : crozets de Savoie
Barquettes biodégradables pour produits alimentaires
La fameuse charentaise
Des lentilles de contact
Un tracteur à hydrogène pour engins de chantier
Des lunettes d’aide à la lecture pour dyslexiques
Un drone qui n’est pas un jouet…
Une façade modulaire et bas carbone pour adapter les bâtiments au changement climatique
Le gyrolift, pour les personnes en situation de handicap, permet de se déplacer en position assise ou debout
Des échelles de pompier déjà largement utilisées
Élégante et fonctionnelle, la bottine de la Garde républicaine.
Le confort et la fraîcheur du lin cultivé en France
Entre artisanat et industrie, le placage en feuilles de noyer pour la construction, l’automobile, etc.
Et toute une usine dans une armoire : micro-impression 3D.

Où je maltraite mes personnages de roman pour la bonne cause

(Rediffusion d’été : « Testé et approuvé : 4 façons de rendre votre protagoniste irrésistible », billet paru à l’origine en 2021.)

La quatrième risque de vous étonner… Non, je plaisante. Mais il existe vraiment quelques recettes simples pour rendre plus intéressante votre héroïne, ou votre héros plus aimable. Surtout, pas besoin d’en faire des personnages exceptionnels, de leur donner une intelligence hors normes, un physique de divinité de l’Olympe ou toute autre capacité surhumaine. C’est la façon de présenter les choses qui compte. (Bien sûr, si l’histoire que vous désirez raconter concerne une déesse avec 190 de QI et un don infaillible pour réussir les œufs en neige, allez-y, ce n’est pas moi qui vous mettrai des bâtons dans les roues.)

1) Qui dit protagoniste dit action. Votre protagoniste sera d’autant plus intéressant et crédible qu’on le ou la verra agir, et en particulier faire des choix. Ce n’est pas moi qui le dit, ce sont les professionnels de Writing Excuses, le podcast bien connu. Vivant de leur plume, ses intervenants ont une idée très claire de ce qui marche, ou pas, auprès du public. Et pour la plupart des récits de fiction, en particulier de genres (SF, fantasy, polar, etc.), cela veut dire un ou une protagoniste qui agit par lui ou elle-même. C’est aussi la recette martelée par les manuels d’écriture à l’usage des scénaristes : au début de l’intrigue, il faut une scène où le héros ou l’héroïne choisit d’entrer dans l’aventure. (Exemple : Save The Cat! de Blake Snyder, que j’ai déjà cité ici.)

2) En butte à l’adversité, notre protagoniste suscite l’émotion. Là aussi, c’est d’une simplicité biblique. Pour rendre un personnage plus touchant, rien de tel que de le montrer en proie au danger, aux persécutions, bref de le menacer sur le plan physique, psychique, ou à travers ses proches… Les humains sont des animaux sociaux, et les lecteurs et lectrices ne font pas exception : quand nous voyons des malheureux dans une histoire, notre émotion s’attache à eux ! C’est une technique particulièrement utile si votre protagoniste n’est pas très aimable au départ. Un exemple quasi parfait se trouve au début du roman (je ne parle pas ici du film) Le Capitaine Blood, de Rafael Sabatini. Le personnage titre est un misanthrope arrogant et peu sympathique. Mais le voir arrêté injustement, condamné et diversement maltraité fait vite basculer la sympathie du public !

3) L’amour est contagieux. S’il n’y a pas de méchants à l’horizon pour rendre la vie difficile au protagoniste, il est toujours possible de jouer la carte de l’émotion en mettant en scène l’amour et l’admiration que d’autres personnages ont pour lui ou pour elle. Regardez la série à (hyper) succès Harry Potter : au début du premier tome, on découvre le jeune Harry à travers les divers sorciers et sorcières qui s’émerveillent qu’il ait survécu à l’attaque de Voldemort, le saluent comme le héros de la prophétie, lui souhaitent longue vie, etc. Ce n’est pas juste le danger évité qui nous émeut à propos de Harry, c’est de voir tous ces gens émus pour lui.

4) Ça commence avec moi. Mais toutes ces recettes ne seraient pas d’une grande efficacité s’il n’y avait pas l’ingrédient magique, celui qui rend possible tous les autres : l’auteure doit croire à sa protagoniste. Si je n’aime pas moi-même un personnage, comment puis-je espérer le faire aimer au public ? C’est donc une question de choix. Il y a des histoires que je choisis de ne pas raconter, parce que je ne me sens pas de faire deux ou trois cents pages dans la peau de tel ou tel individu. J’aurais bien du mal, par exemple, à raconter une histoire du point de vue de Napoléon Bonaparte, car je n’aime guère le personnage. L’époque qu’il définit est passionnante, en revanche, et je suis en train d’en tirer un troisième roman… Mais du point de vue de divers autres personnages, pour qui j’ai plus de tendresse et aux destinées desquels je peux m’intéresser. C’est déjà un bon point de départ si on veut espérer les faire aimer aussi à autrui.