
« En Allemagne, pour faire de la politique, il faut un doctorat. En Italie, il faut avoir fait de la télé. Et en France, il faut avoir écrit un livre. »
Je ne sais plus de qui est ce petit topo ironique, entendu sous l’ère Mitterrand, mais c’est assez bien vu. Mais au fait, quel genre de livre ? Souvent un exposé des idées du candidat ou de la candidate, son programme, sa vision du futur. C’est logique mais un peu banal. Un autre choix fréquent : la biographie historique d’un personnage qu’on prend comme modèle et inspiration. François Bayrou a ainsi rencontré un succès public avec une vie d’Henri IV, par exemple.
Mais on peut aussi préférer écrire un roman. Ils sont nombreux à s’y être essayé, de Dominique de Villepin à Marlène Schiappa, de Valéry Giscard d’Estaing à Bruno Le Maire, pour citer le cas qui fait bruire le microcosme en ce moment.
Est-ce que je pense quelque chose de ce roman ? Non, je ne l’ai pas lu. Pour ce que j’en ai vu, dans les extraits « croustillants » publiés ici et là, le bouquin a l’air de n’être ni meilleur ni pire que la majorité de ce qui se publie en France, bon an mal an. Ni excès d’honneur, ni indignité, etc. Je ne jette la pierre à personne : quand vous êtes capable d’écrire des romans (même avec l’aide d’un discret « collaborateur », qui sait), pourquoi garder ça sous le boisseau ? Qui parmi nous aurait assez de sagesse pour ne pas chercher à faire publier même leurs textes les moins réussis ? Et on trouve bien sûr plus facilement un éditeur quand on est déjà connu comme ministre ou député.
Mais tout cela m’a rappelé un cas différent : un politique qui a écrit des romans, et choisi de ne pas publier. Un certain Emmanuel Macron.

Adolescent, et encore bien loin, évidemment, de savoir qu’il entrerait un jour à l’Élysée, le lycéen avait rédigé un roman paraît-il torride, inspiré par son amour pour sa prof de français. On sait ce qu’est devenu cet amour depuis. Le roman, lui, a fini dans un tiroir. Seule Brigitte Macron l’aurait lu en entier.
Le jeune Emmanuel Macron a même récidivé un peu plus tard, à 19 ans, avec un second roman, consigné lui aussi dans un tiroir. Il y a de quoi être curieux, non ? Mais je trouve cela surtout instructif. On accuse souvent les politiques d’avoir un ego démesuré, et c’est parfois vrai. Et les écrivains en général sont rarement en panne de narcissisme. Pourtant, ici, c’est un cas où un auteur choisit ce qui est important dans sa vie, et opte pour ne pas privilégier l’écriture, alors même qu’il semblait avoir la plume facile.
On ne peut que saluer cette sagesse. Et la solidité mentale que cela implique. Un Narcisse aurait au contraire tout fait pour rendre public le moindre de ses brouillons.